Les différents types d’instruments utilisés en spectrométrie de masse

Les différents types d’instruments utilisés en spectrométrie de masse

En spectrométrie de masse, il est capital de pouvoir maîtriser les expériences menées. Une fois qu’un ion a été créé dans des conditions soigneusement contrôlées, il doit être détecté en tant qu’événement distinct avec une sensibilité adéquate. En raison de la charge de vapeur minimale, la GC était à l’origine considérée comme la technologie de séparation idéale, mais seulement pour environ 20 % des composés. Aujourd’hui, il est plus courant de nébuliser l’éluant LC pour introduire les analytes à ioniser dans un spectromètre de masse, une technique qui nécessite des conditions de vide pour garantir un meilleur contrôle.

La capacité de pompage est une caractéristique importante pour tout spectromètre de masse. Le vide doit être bien réparti dans les zones de l’instrument où l’atmosphère est raréfiée. En outre, il doit être suffisant pour compenser des impératifs de conception tels que la taille de l’entrée des ions et la quantité de vapeur à éliminer.

Entrée

Pompage nécessaire pour maintenir les pressions analytiques

GC à débit capillaire (1 mL/min)

~400

LC à microdébit (10 mL/min)

~5 000

LC sur colonne classique (1 mL/min)

~50 000

Approximation de la capacité de pompage nécessaire (en L/s) à l’élimination de la vapeur générée en vue de maintenir une pression analytique type de 3 × 10-6 torr (4 x 10-6 mbar) afin de détecter les ions sous forme d’événements distincts, en fonction de l’entrée utilisée.

Les capacités de pompage nécessaires en LC/MS dépendent de l’interface utilisée. Ce paramètre est l’une des raisons qui ont poussé au développement de la source API, avec laquelle la vapeur est éliminée avant son entrée dans le spectromètre de masse.

L’analyseur : le cœur du spectromètre de masse

L’analyseur : le cœur du spectromètre de masse

L’analyseur est un instrument permettant de séparer ou de distinguer les ions introduits. Des ions positifs et négatifs, ainsi que des espèces neutres non chargées se forment dans la source d’ionisation. Cependant, une seule polarité ne peut être enregistrée à la fois. Les instruments actuels peuvent changer de polarité en quelques millisecondes, ce qui permet d’obtenir des enregistrements haute fidélité, y compris pour les événements transitoires rapides, tels que ceux typiques de la chromatographie liquide ultra-performante (UPLC) ou des séparations GC dans lesquelles les pics n’ont qu’une seconde de largeur environ.

Quadripôles

En 1953, les physiciens ouest-allemands Wolfgang Paul et Helmut Steinwedel ont décrit le développement d’un spectromètre de masse quadripolaire. Ils ont démontré que la superposition de potentiels de radiofréquence (RF) et de courant continu constant (CC) entre quatre tiges parallèles agissait comme un séparateur de masse, ou un filtre, où seuls les ions compris dans une plage de masses donnée et présentant des oscillations d’amplitude constante peuvent passer au niveau de l’analyseur.

Aujourd’hui, les instruments sont conçus pour cibler des applications spécifiques. Les spectromètres de masse simple quadripolaire nécessitent une matrice propre pour éviter l’interférence d’ions indésirables et présentent une très bonne sensibilité.

Les spectromètres de masse triple quadripolaires ou à quadripôles en tandem (MS/MS) disposent d’un quadripôle supplémentaire, qui peut endosser plusieurs rôles. L’une des méthodes consiste simplement à séparer et à détecter les ions d’intérêt dans un mélange complexe en fonction de leur rapport masse/charge (m/z) unique. Ce quadripôle supplémentaire peut également être utilisé conjointement avec des processus de fragmentation contrôlée. Ces processus consistent à induire la collision des ions d’intérêt avec une autre molécule (généralement un gaz comme l’argon). Dans une telle application, un ion précurseur se fragmente en ions produits et l’instrument MS/MS identifie le composé d’intérêt à partir des éléments qui le constituent.

Le quadripôle de l’analyseur se compose de quatre tiges métalliques (par exemple un alliage de molybdène) généralement parallèles. Le développement de la conception des quadripôles a fait l’objet de beaucoup de recherches. Les masses sont triées en fonction du mouvement des ions, entraînés dans l’analyseur par les champs de courant continu (CC) et de radiofréquence (RF). La modification systématique de l’intensité du champ via le logiciel de pilotage modifie la valeur m/z filtrée ou transmise au détecteur à un instant donné. Les quadripôles offrent une résolution inférieure à celle de certains spectromètres de masse, comme les instruments à temps de vol (ToF). Toutefois, les quadripôles présentent de nombreux autres avantages. Ils sont relativement simples, faciles à utiliser et très pratiques et offrent une variété d’interfaces à un coût relativement faible.

Nous emploierons plusieurs termes (définis plus en détail à la fin de ce guide technique) pour comparer et décrire les capacités d’un spectromètre de masse :

Pouvoir de résolution

Souvent désigné par l’abréviation « rés », le pouvoir de résolution est la capacité d’un spectromètre de masse à séparer deux masses :

  • Rés. faible = unité de masse = 1 000
  • Rés. supérieure ou moyenne = 1 000 à 10 000
  • Haute rés. = 10 000+
  • Très haute rés. = jusqu’à 3 - 5 millions
  • Pour plus de détails sur la résolution et la façon dont nous la mesurons, consultez la section « Exactitude et résolution en masse ».

La masse exacte calculée est la valeur théorique exacte de la masse d’un composé, tandis que la masse exacte mesurée est la valeur de la masse d’un composé déterminée expérimentalement avec une barre d’erreur associée, telle que 5 ppm. Le terme « masse exacte » est également couramment utilisé pour désigner la technique plutôt que la masse mesurée. Pour les travaux en masse exacte (par exemple, pour publier dans un journal ou déposer un brevet), on considère généralement qu’il faut pouvoir dériver une mesure sur un instrument à 5 ppm près par rapport à sa masse théorique. Notez que 5 ppm à 250 Da équivaut à 1,25 mDa (et non 5 mDa, qui correspondrait à 20 ppm à 250 Da).

MS/MS

Décrit une variété d’expériences, notamment le suivi de réactions multiples (MRM) et le suivi de réaction simple (SRM). Il s’agit d’observer la transition des ions précurseurs, ou fragmentations, en ions produits. En règle générale, ces techniques permettent d’améliorer la sélectivité, la spécificité et/ou la sensibilité de la détection par rapport à une expérience avec un instrument à une seule étape. Ici, un même instrument contient deux analyseurs de masse montés en série, ou effectue deux étapes d’analyse de masse.

Dans un spectromètre de masse triple quadripolaire, il existe trois jeux de filtres quadripolaires, bien que seuls le premier et le troisième fonctionnent comme des analyseurs de masse. Dans certaines conceptions récentes, le quadripôle du milieu a été remplacé par un dispositif plus évolué, offrant une fonctionnalité accrue, de sorte que l’on préfère aujourd’hui le terme de quadripôle en tandem. Le premier quadripôle (Q1), agissant comme un filtre de masse, transmet et accélère un ion sélectionné en direction de Q2, appelé cellule de collision. Bien que dans certaines conceptions, Q2 soit similaire aux deux autres quadripôles, une radiofréquence lui est imposée uniquement à des fins de transmission, et non à des fins de sélection des masses. La pression dans Q2 étant plus élevée, les ions entrent en collision avec un gaz neutre. Il en résulte une fragmentation par dissociation induite par collision (CID). Les fragments sont ensuite accélérés vers Q3, un autre filtre de masse à balayage, qui les trie avant leur entrée dans un détecteur.

Fragmentation

Fragmentation

La dissociation induite par collision (CID), également appelée dissociation activée par collision (CAD), est un mécanisme par lequel les ions moléculaires sont fragmentés en phase gazeuse. Pour cela, les ions subissent généralement une accélération induite par un potentiel électrique jusqu’à atteindre une énergie cinétique élevée dans la région sous vide, puis entrent en collision avec des molécules de gaz neutres comme l’hélium, l’azote ou l’argon. Une partie de l’énergie cinétique est convertie ou internalisée par la collision, ce qui provoque la rupture des liaisons chimiques et l’éclatement de l’ion moléculaire en fragments plus petits. D’autres méthodes de fragmentation similaires existent pour des usages plus spécifiques, comme la dissociation par transfert d’électrons (ETD) et la dissociation par capture d’électrons (ECD). Consultez la rubrique « Méthodes d’ionisation biomoléculaire ».

Spectre des ions produits de l’endosulfan-ß

L’ion précurseur de 237 Da entrant par la gauche est fragmenté dans la cellule de collision MS/MS. Le système de données peut afficher uniquement les fragments d’intérêt (tous les fragments ne sont pas représentés), ce qui permet d’obtenir un spectre relativement simple par rapport au spectre MS en balayage complet. Vous pouvez paramétrer l’étendue de la fragmentation et choisir l’ion précurseur à observer.

HPLC en phase inverse

Le terme phase inverse décrit le mode chromatographique opposé à celui en phase normale, à savoir l’utilisation d’une phase mobile polaire et d’une phase stationnaire apolaire [hydrophobe]. La figure S-2 illustre la séparation du mélange noir composé de trois colorants à l’aide d’un tel protocole.

La figure comparant la réponse MRM (à gauche) et la réponse SIR (à droite) montre comment le pic de l’analyte, même lorsqu’il est présent en solution, peut ne pas être déterminé à partir des données SIR en raison du bruit de fond chimique de la matrice. Un quadripôle en tandem ou triple peut réaliser toutes les expériences d’un quadripôle unique. Cette comparaison côte à côte n’implique donc aucun changement de matériel ni d’échantillon. Le même instrument GC/MS/MS a été utilisé pour filtrer l’ion butylate de 146 m/z en tant que précurseur et le fragmenter en ions produits (57 m/z sur l’illustration) afin d’identifier sa présence de façon positive et quantifiable.

Pour répondre aux critères d’identification positive des composés dans certains secteurs réglementés, les transitions MRM valent 1,5 « point d’identification », tandis que les tracés SIR valent 1,0 point. Ainsi, en supposant une sélectivité suffisante, vous aurez besoin de 2 transitions MRM, mais de 3 tracés SIR pour obtenir 3 points d’identification.

Le secteur magnétique, ou analyseur de masse à champ sectoriel, est une ancienne conception d’instrument que l’on retrouve encore aujourd’hui, bien que rarement. Il a été détrôné par les instruments ESI modernes capables de fonctionner en mode d’ionisation ESI. À titre d’exemple, le système AutoSpec de Waters est extrêmement populaire pour l’analyse des dioxines à très haute sensibilité.

Les secteurs courbent la trajectoire des ions de sorte à former un arc. Le rapport entre le point d’impact et la charge de chaque ion permet de déterminer le rayon de sa trajectoire, elle-même déterminée par un champ électrique et/ou magnétique. Plus le rapport m/z d’un ion est important, plus sa trajectoire sera longue. Les trajectoires peuvent être contrôlées en faisant varier l’intensité du champ magnétique. Les spectromètres de masse à double focalisation combinent des champs magnétiques et électriques sous diverses configurations, la plus courante étant un secteur électrique, suivi d’un secteur magnétique. Cette hybridation, qui est la plus ancienne, utilise le secteur électrique pour focaliser les ions en fonction de leur énergie cinétique à leur sortie de la source. Une focalisation angulaire précédée d’une focalisation énergétique permet d’obtenir des séparations d’ions de même masse nominale, mais de formules chimiques différentes.

Pièges à ions et autres instruments sans balayage

Pièges à ions et autres instruments sans balayage

Un piège à ions fonctionne selon des principes similaires à ceux d’un instrument quadripolaire. En revanche, contrairement au quadripôle, qui filtre les ions en circulation, le piège à ions et le cyclotron ionique (ICR), plus performant que le premier, stockent les ions dans un espace tridimensionnel. Avant la saturation, le piège ou le cyclotron peut expulser certains ions vers le détecteur, en fonction de leur masse. Il est possible de réaliser une série d’expériences dans l’enceinte du piège, en fragmentant un ion d’intérêt de sorte à mieux définir le précurseur par ses fragments. Les champs générés par les tensions RF appliquées à une géométrie empilée ou en « sandwich » (électrodes-chapeaux à chaque extrémité) piègent les ions dans l’espace situé entre les deux électrodes. L’augmentation ou le balayage de la tension RF expulse les ions de leur fréquence séculaire ou du piège. La gamme dynamique est parfois limitée. Les limites de volume et de capacité à accueillir des ions restreignent la portée de l’instrument, en particulier pour les échantillons en matrice complexe.

Les pièges à ions ont été introduits dans les années 80. Mais les limites imposées par le schéma d’ionisation interne utilisé dans ces premiers instruments les rendaient inadaptés pour de nombreuses applications. Ce n’est qu’avec l’avènement de l’ionisation externe que les instruments sont devenus plus polyvalents.

La possibilité d’effectuer une fragmentation séquentielle pour dériver plus d’informations structurales à partir d’un analyte unique (c’est-à-dire fragmenter un ion, sélectionner un fragment particulier et répéter le processus) est appelée MSn. Les pics chromatographiques en GC ne sont pas suffisamment larges pour permettre plus d’une fragmentation (MS/MS ou MS2). Contrairement aux instruments quadripolaires et à secteur, les instruments à piège ionique réalisent les expériences de MS/MS ou de fragmentation dans le temps plutôt que dans l’espace. Ils ne sont donc pas adaptés à certaines expériences MS/MS comme les comparaisons de perte de neutre et d’ions précurseurs. De plus, lors d’utilisation d’un piège à ions en mode MS/MS, le tiers inférieur du spectre MS/MS est perdu, en raison de la conception du piège. Pour contrer cette perte, certains fabricants proposent, via leur logiciel, des exigences de balayage plus étendues qui nécessitent de changer les paramètres de fonctionnement au cours de l’acquisition des données.

La conception du piège plafonne le ratio entre le rapport masse/charge (m/z) d’un ion précurseur et celui de l’ion fragment piégé le plus faible. Ce phénomène est communément appelé « règle du tiers ». Par exemple, les ions fragments issus d’un ion à m/z 1 500 ne seront pas détectés en dessous de m/z 500, ce qui constitue une limite significative pour le séquençage peptidique de novo. Le piège à ions a une gamme dynamique limitée, du fait des effets de charge d’espace lorsqu’un trop grand nombre d’ions pénètrent dans l’espace de piégeage. Les fabricants ont mis au point un balayage automatisé, qui compte les ions avant qu’ils n’entrent dans le piège, limitant ainsi le nombre autorisé d’ions. Des difficultés peuvent encore survenir lorsque la quantité d’un ion d’intérêt est relativement faible par rapport aux ions de la matrice.

En raison de leur similarité, certains instruments quadripolaires ont été conçus pour intégrer les avantages du quadripôle linéaire et du piégeage des ions. Ces instruments hybrides offrent une meilleure sensibilité et permettent de réaliser des expériences à la volée inaccessibles avec l’une ou l’autre des techniques employée seule. De tels instruments sont parfois appelés pièges linéaires ou Q-traps. L’augmentation du volume d’un piège linéaire (par rapport à un piège à ions tridimensionnel) offre une gamme dynamique plus étendue.

Contrairement aux instruments quadripolaires, les instruments à piégeage ionique n’effectuent pas de balayage. Les modes SIM (suivi d’un ion unique) ou SIR (fragmentogramme) n’améliorent donc pas la sensibilité des pièges à ions comme sur les instruments à quadripôle et à secteur.

Les instruments à résonance cyclotron ionique à transformée de Fourier (FTICR) offrent des capacités exceptionnelles de mesure de la masse et permettent de résoudre des masses très proches. Bien qu’ils s’avèrent peu pratiques pour la plupart des applications, équipés d’un aimant de 14,5 tesla, ils peuvent atteindre une résolution supérieure à 3,5 millions et ainsi distinguer deux entités moléculaires ayant une différence de masse inférieure à la masse d’un électron.

Les instruments à cyclotron piègent les ions par voie électrostatique dans une cellule par le biais d’un champ magnétique constant. Les impulsions de tension RF créent un mouvement ionique orbital. Les ions en orbite génèrent alors un petit signal au niveau des plaques de détection de la cellule (la fréquence orbitale de l’ion). La fréquence est inversement proportionnelle au rapport m/z des ions, et l’intensité du signal est proportionnelle au nombre d’ions de même valeur m/z dans la cellule. À des pressions de cellule très basses, un instrument à cyclotron peut maintenir l’orbite d’un ion pendant de longues périodes, offrant ainsi des mesures hautement résolutives.

La dissociation induite par collision à irradiation soutenue sans résonance (SORI-CID) est une technique de CID utilisée en spectrométrie de masse à résonance cyclotron ionique à transformée de Fourier. Les ions sont accélérés par un mouvement cyclotronique où une pression croissante provoque des collisions produisant des fragments. Après la fragmentation, la pression est réduite et le vide est rétabli pour analyser les ions fragments.

Bien que développés il y a de nombreuses années, les instruments à temps de vol (ToF) sont aujourd’hui à la base de nombreux travaux en raison de leur système électronique rapide et précis et des techniques d’ionisation modernes qu’ils emploient comme l’ESI. Un instrument à temps de vol fournit une mesure de la masse exacte à quelques parties par million (ppm) près de la masse réelle d’une molécule. Analyseur de masse à dispersion temporelle, l’instrument à temps de vol est utilisé de façon linéaire ou comme un réflectron à l’aide de grilles électrostatiques et de lentilles. Lorsqu’il est utilisé comme un réflectron, la résolution est augmentée sans perte significative de sensibilité ni augmentation de la taille du tube de vol (ou de dérive).

Les ions sont accélérés par une impulsion haute tension dans un tube de dérive ou de vol. Les ions légers atteignent la plaque multicanal (MCP ou détecteur) plus tôt que les ions lourds.

Les analyses à temps de vol impliquent l’accélération d’un groupe d’ions, en une brève rafale, vers un détecteur. Les ions sortent de la source, chacun ayant reçu d’une électrode de « poussée » une charge électrique, ou potentiel, identique. Le potentiel de chaque ion l’accélère, ou le projette, dans un tube à très basse pression. Comme tous les ions de charge similaire partagent la même énergie cinétique (énergie cinétique = ½ mv2, où m est la masse de l’ion et v la vélocité), les ions ayant les masses les plus faibles présentent une vélocité plus importante et atteignent le détecteur plus rapidement. Comme le temps nécessaire à un ion pour atteindre le détecteur dépend de la masse, de la charge et de l’énergie cinétique, la vitesse de l’ion peut être représentée par l’équation v = d/t = (2KE/m)1/2. Les ions parcourent une distance donnée (d) en un temps (t), où t dépend du rapport masse sur charge (m/z). Toutes les masses étant mesurées pour chaque « impulsion », l’instrument à temps de vol peut atteindre une sensibilité très élevée par rapport aux instruments à balayage.

À l’heure actuelle, les spectromètres de masse quadripolaires effectuent des balayages en routine à 10 000 Da, ou uma, par seconde. Ainsi, un balayage complet, même de courte durée, pour un pic LC ou GC d’une seconde par exemple, capturerait néanmoins chaque ion au moins 10 fois par seconde. Le détecteur de l’instrument à temps de vol enregistre les ions bombardés sur la plaque à quelques nanosecondes près les uns des autres. Une telle résolution permet d’obtenir d’une gamme dynamique plus large et une plus grande sensibilité par rapport à un instrument à balayage tel qu’un quadripôle. Toutefois, les instruments quadripolaires offrent, de manière générale, une meilleure sensibilité pour la détection d’analytes cibles dans des mélanges complexes. Ils sont alors plus adaptés à la quantification. Certains instruments, comme les pièges à ions, combinent ces fonctions. Mais jusqu’à l’avènement des instruments hybrides, aucun instrument ne pouvait fournir à lui seul des performances de haut niveau à tous égards.

Les premiers instruments MALDI-TOF (utilisant une désorption-ionisation laser assistée par matrice) accéléraient les ions hors de la source d’ionisation. Leur résolution était relativement faible et leur exactitude limitée. Développée pour les instruments MALDI-TOF, l’extraction retardée (DE), refroidit et concentre les ions pendant environ 150 nanosecondes après leur formation. Elle accélère ensuite les ions dans le tube de vol. Les ions refroidis ont une distribution d’énergie cinétique plus faible que les ions non refroidis. La dispersion temporelle des ions est alors réduite lorsqu’ils pénètrent dans l’analyseur à temps de vol, ce qui se traduit par une résolution et une exactitude accrues. La DE est significativement moins adaptée aux macromolécules (par exemple les protéines > 30 000 Da).

La sensibilité du mode de balayage est cinq à dix fois supérieure pour l’instrument TOF par rapport au QQQ. Ces données proviennent de la même aliquote d’échantillon. Cependant, le passeur d’échantillons utilisé avec l’instrument TOF était équipé d’une seringue de 5 µL. Le passeur d’échantillons utilisé avec l’instrument triple quadripolaire était équipé d’une seringue de 10 µL. Des injections respectives de 0,5 et 1,0 µL ont donc été réalisées.

Instruments hybrides

Le terme « hybride » s’applique à diverses conceptions de spectromètre de masse qui combinent des technologies existantes telles que la double focalisation, les secteurs magnétiques et, plus récemment, les pièges à ions utilisés en amont d’un cyclotron. L’une des plus intéressantes d’entre elles est le spectromètre de masse quadripolaire à temps de vol (Q-ToF), couplage d’un instrument à temps de vol et d’un instrument quadripolaire. Cette hybridation combine plusieurs caractéristiques de performance : une mesure de la masse exacte, la possibilité de réaliser des expériences de fragmentation et une quantification de haute qualité.

Une innovation ultérieure a permis de coupler les mesures et séparations en mobilité ionique avec la spectrométrie de masse en tandem. La spectrométrie de masse à mobilité ionique est une technique qui différencie les ions en fonction d’une combinaison de facteurs : la taille, la forme, la charge et la masse. Notez que nous utiliserons ici l’acronyme « IMMS » pour la distinguer de l’imagerie par spectrométrie de masse souvent abrégée en « IMS ». Les dispositifs IMMS sont couramment utilisés dans les aéroports et les unités de terrain portatives pour détecter rapidement (20 ms) de petites molécules dont la mobilité est connue, par exemple certains narcotiques et explosifs. Couplé à des instruments d’ordre supérieur, l’IMMS offre une dimension de séparation orthogonale (à la fois pour la LC et la spectrométrie de masse) et des fonctionnalités uniques, notamment les suivantes :

  • Séparation des isomères, des isobares et des conformères (des protéines aux petites molécules) et détermination de leur section efficace de collision moyenne en rotation
  • Meilleure séparation des mélanges complexes (par MS ou LC-MS) entraînant une augmentation de la capacité des pics et de la purification des échantillons (séparation physique des ions, en particulier du bruit chimique et des ions qui interfèrent avec les analytes d’intérêt)
  • Performances des méthodes CID/IMMS, IMMS/CID ou CID/IMMS/CID et amélioration de la quantité d’informations significatives pouvant être obtenues à partir d’expériences de fragmentation dans les études d’élucidation des structures

Dans les trois scénarios analytiques, l’association d’une mobilité ionique hautement efficace et d’une spectrométrie de masse en tandem peut vous aider à réaliser des analyses inaccessibles avec d’autres techniques, notamment les instruments classiques de spectrométrie de masse classique ou de chromatographie en phase liquide.

L’article de synthèse de H.H. Hill Jr., et al., cité à la fin de cette section, compare et oppose divers types de spectromètres de masse à mobilité ionique disponibles au moment de la publication de l’article en 2007. Il décrit en outre les avantages de leur application à une large gamme d’analytes. Il cible quatre méthodes de séparation par mobilité ionique couramment utilisées en spectrométrie de masse :

  • Spectrométrie à mobilité ionique à temps de dérive (DTIMS)
  • Spectrométrie à mobilité ionique par aspiration (AIMS)
  • Spectrométrie à mobilité différentielle (DMS), également appelée spectrométrie à mobilité ionique à forme d’onde asymétrique (FAIMS)
  • Spectrométrie à mobilité ionique à ondes progressives (TWIMS)

Selon les auteurs, « la DTIMS est la technique d’IMS offrant le meilleur pouvoir de résolution et la seule méthode (IMMS) permettant de mesurer directement les sections efficaces de collision. L’AIMS est une méthode de séparation par mobilité à faible résolution, mais elle permet de suivre les ions en continu. La DMS et la FAIMS offrent une fonction de suivi des ions en continu, ainsi que des séparations en mobilité ionique orthogonales permettant d’atteindre une sélectivité de séparation élevée. La TWIMS est une nouvelle méthode (IMMS) dont le pouvoir de résolution est relativement faible. Toutefois, elle offre une bonne sensibilité et s’intègre bien dans le fonctionnement d’un spectromètre de masse commercial. »

Des ions indifférenciés de mobilité différente, représentés par des billes colorées, sont piégés, accumulés et libérés dans le dispositif de séparation par mobilité ionique (IMS) T-Wave (figure du haut).
Une fois les ions libérés dans la région du dispositif T-Wave, une onde progressive les fait traverser un gaz tampon neutre (généralement de l’azote à 0,5 mbar) en les séparant selon leur mobilité (figure du milieu).
Les « paquets » séparés d’ions présentant les mêmes caractéristiques de mobilité sont ensuite dirigés vers le tube de dérive TOF, où leurs valeurs m/z sont mesurées (figure du bas). Le système est donc en mesure de séparer les ions isobares (ions de valeur m/z identique) ou de valeur m/z très similaire avant l’analyse de masse, ce qui augmente la capacité globale de pics du système MS ou LC/MS.

Couplée à la spectrométrie de masse, la mobilité ionique est également utilisée pour étudier les structures de biomolécules en phase gazeuse. L’étude de Pringle et al. (citée ici) examine la séparation par mobilité de certains ions peptidiques et protéiques à l’aide d’un instrument hybride combinant un quadripôle, un séparateur à mobilité ionique à ondes progressive et un tube de vol à accélération orthogonale. La comparaison des données de mobilité obtenues à partir du dispositif de séparation à ondes progressives (TWIMS) avec celles obtenues à l’aide de divers autres séparateurs par mobilité indique que « si les caractéristiques de mobilité sont similaires, la nouvelle géométrie de l’instrument hybride permet une séparation par mobilité sans compromettre la sensibilité de base du spectromètre de masse. Cette fonctionnalité facilite les études de mobilité dans des échantillons à des niveaux analytiquement significatifs. »


Consultez également :

  • Special Feature Perspective: Ion mobility-Mass Spectrometry, A. B. Kanu, P. Dwivedi, M. Tam, L. Matz and H. H. Hill Jr., J. Mass Spectrom. 2008; 43: 1-22 Publié en ligne sur Wiley InterScience, (https://onlinelibrary.wiley.com/) DOI: 10.1002/jms.1383
    • Intérêt de cette ressource : un aperçu concis de la mobilité ionique couplée à la spectrométrie de masse. Il fournit 160 références sur la spectrométrie de masse à mobilité ionique (IMMS).
  • An investigation of the mobility separation of some peptide and protein ions using a new hybrid quadrupole/traveling wave IMS/oa-ToF instrument, S. D. Pringle, K. Giles, J. L. Wildgoose, J. P. Williams, S. E. Slade, K. Thalassinos, R. H. Bateman, M. T. Bowers, J. H. Scrivens, Publié en ligne (www.sciencedirect.com), International Journal of Mass Spectrometry (2006), doi:10.1016/j.ijms.2006.07.021
    • Intérêt de cette ressource : décrit le fonctionnement de l’IMMS avec les biomolécules.

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