Choix des solvants et mises en garde relatives à la LC/MS

Choix des solvants et mises en garde relatives à la LC/MS

On choisit généralement un solvant en fonction de la solubilité du composé d’intérêt et de sa compatibilité avec les différentes techniques d’ionisation utilisées en LC/MS. La volatilité du solvant et sa capacité à céder un proton sont importantes en ESI et dans d’autres techniques d’ionisation à pression atmosphérique.

On peut utiliser des solvants primaires protiques, comme le méthanol, ou certaines solutions aqueuses, comme le mélange méthanol/eau à 1:1 ou acétonitrile/H2O à 1:1. Notez toutefois que le mélange eau/méthanol possède une viscosité bien supérieure à celle de l’eau ou du méthanol utilisés seuls en raison de la réaction exothermique se produisant dans le mélange. L’eau utilisée seule peut nuire à la sensibilité de l’analyse en raison de la pression relativement faible de sa vapeur. On obtient une meilleure sensibilité lorsque la tension de surface est diminuée par l’ajout d’un solvant organique volatil. Bien qu’ils favorisent la libération d’ions à partir des gouttelettes nébulisées, les tensioactifs ayant une plus grande affinité protonique peuvent également réduire la sensibilité.

L’utilisation de cosolvants aprotiques, tels que le DMSO à 10 % dans l’eau et l’isopropanol, améliore la solubilité de certains composés. On ajoute souvent de l’acide formique en faible quantité (0,1 %) pour garantir que l’analyte est plus basique que le solvant et ainsi favoriser l’ionisation. Notez toutefois que, bien que nécessaires pour traiter des composés autrement insolubles, certains acides, comme le TFA, peuvent limiter la sensibilité même lorsqu’ils ne sont présents qu’en petites quantités.

En mode d’ionisation ESI, les tampons et les sels (Na+, K+ et phosphate) entraînent une réduction de la pression de la vapeur et, par conséquent, induisent une perte de signal. L’augmentation de la tension de surface des gouttelettes et la réduction de la volatilité qui en résulte peuvent être corrigées en utilisant des tampons relativement plus volatils comme l’acétate d’ammonium, formé par une paire acide-base faible.

Choix des solvants

  • Le solvant en phase gazeuse limite l’ionisation par ESI aux molécules plus basiques que le solvant. L’exception est la photoionisation, qui n’est pas une ionisation acide-base, mais qui se produit néanmoins par médiation du solvant.
  • L’élimination du solvant et de la vapeur d’eau de la zone d’ionisation augmente le nombre de composés ionisables à pression atmosphérique.
  • La réduction du volume de liquide par rapport à l’échantillon ou à l’analyte d’intérêt contenu dans le liquide (c’est-à-dire le recours à des débits plus faibles) améliore les performances de l’ESI.
  • Solvants utiles
    • Eau
    • Acétonitrile
    • Méthanol
    • Éthanol
    • Propanol
    • Isopropanol
  • Additifs acceptables
    • Acide acétique
    • Acide formique
    • Hydroxyde d’ammonium
    • Formiate d’ammonium (concentration en sel inférieure ou égale à 10 mM)
    • Acétate d’ammonium (concentration en sel inférieure ou égale à 10 mM)
  • Sels non volatils (phosphate, borate, citrate, etc.)
    • Peut former des dépôts dans la source et boucher les capillaires, ce qui nécessite un nettoyage et une maintenance plus fréquents.
    • Les sources actuelles gèrent mieux les composés non volatils que les sources plus anciennes.
  • Les agents de surface (tensioactifs/détergents) inhibent l’ionisation par électrospray.
  • Les acides inorganiques sont corrosifs.
  • Acide trifluoroacétique (TFA)
    • Inhibe dans une certaine mesure l’ionisation par électrospray en mode positif à des niveaux supérieurs à 0,01 %.
    • Inhibe grandement l’ionisation par électrospray en mode négatif.
  • Triéthylamine (TEA)
    • Une concentration élevée en PA (232 Kcal/mole) produit une grande quantité d’ions [M+H]+ à m/z 102.
    • Inhibe grandement l’ionisation électrospray en mode positif des composés moins basiques.
  • Tétrahydrofurane (THF)
    • Le THF à 100 % est hautement inflammable. L’APCI et la plupart des techniques d’interface utilisent donc de l’azote comme gaz de nébulisation. L’utilisation d’air engendre un risque d’explosion.
    • Réagit avec les tubulures en PEEK.

Suppression ionique et choix des chimies

La suppression ionique est l’un des problèmes les plus évidents lorsque l’on utilise l’ionisation par électrospray. Publié par la Food and Drug Administration (FDA) en 2001, le document Guidance for Industry on Bioanalytical Method Validation (Federal. Register, 66, 100, 28526) précise qu’il est nécessaire de prendre ce phénomène en compte pour garantir que la qualité de l’analyse n’est pas compromise. L’article mentionne plusieurs protocoles expérimentaux permettant d’évaluer la présence d’une suppression ionique. La première consiste à comparer la réponse de suivi par MRM (surface ou hauteur des pics) pour un analyte présent dans un échantillon post-extraction dopé à celle de l’analyte injecté directement dans la phase mobile pure. L’obtention d’un signal d’analyte plus faible dans la matrice que dans le solvant pur indique la présence d’interférences.

Une publication de C. Mallet et al. décrit les zones du chromatogramme où l’on peut observer les effets de la matrice sur l’analyte (et l’étalon interne). À des fins d’expérimentation, on utilise un débit continu d’une solution étalon contenant l’analyte d’intérêt et son étalon interne, ajoutés à l’effluent de la colonne. Après injection d’un extrait d’échantillon blanc sur le système LC, une chute de la ligne de base constante indique une inhibition de l’ionisation de l’analyte due à la présence de composés interférents.

Chimies de colonnes

L’avènement des chimies de colonnes hybrides et des particules hautement sélectives d’une granulométrie inférieure à 2 µm constitue l’un des changements technologiques les plus importants. Les chimies hybrides dépendent moins des modificateurs de phase mobile pouvant entraîner une suppression ionique et offrent une meilleure sélectivité des particules.

LC à ultra haute pression contre HPLC classique

Issue des travaux du professeur J. Jorgenson (Université de Caroline du Nord) et récemment mise sur le marché, la chromatographie liquide à ultra-haute pression, ou UHPLC, offre la possibilité d’améliorer les informations dérivées d’analyses LC/MS classiques. Commercialisée par Waters Corporation sous le nom d’UPLC, ou chromatographie liquide ultra-performante, elle offre une meilleure capacité de pics par rapport à l’HPLC, permettant de définir des entités chimiques qui, auparavant, auraient coélué avec des pics plus larges de l’HPLC. La concentration des pics en bandes d’une largeur généralement inférieure ou égale à deux secondes permet d’obtenir une meilleure sensibilité en améliorant la réponse du spectromètre de masse grâce à un meilleur rapport signal/bruit.

L’UPLC bouscule des paramètres bien établis dans la chromatographie traditionnelle, tels que le débit, la granulométrie ou encore notre approche des courbes de Van Deemter. Lorsque la pression de travail passe d’environ 2 000 psi à 20 000 psi, la granulométrie inférieure à 2 µm s’approche de la limite théorique décrite en 1969 par John Knox dans l’équation qui porte son nom. Une fois qu’ont été résolus les problèmes liés aux contraintes mécaniques accrues et à l’amplification des effets thermiques, l’amélioration des performances de la spectrométrie de masse qui en résulte peut sembler quelque peu contre-intuitive.

Considérant les variations d’efficacité dues à la vélocité linéaire, représentée sous forme de courbes de Van Deemter, les colonnes garnies de particules de 1,7 µm de diamètre donnent de meilleurs résultats, quel que soit le débit.

Bien que toutes les colonnes présentent une baisse de performance à des vélocités linéaires extrêmement faibles, ce qui est habituel en HPLC, les performances des colonnes avec une plus petite granulométrie sont supérieures et montrent moins de perte de performance à mesure que la vélocité linéaire augmente.

La comparaison des séparations HPLC avec les séparations UPLC illustre bien la façon dont la technologie a redéfini l’approche de la conception expérimentale. Non seulement les principes sous-jacents ont redéfini les séparations (jusqu’à quatre fois plus courtes), mais la sélectivité s’est accrue, ce qui permet de découvrir des détails cachés tels que les métabolites du midazolam illustrés sur la figure. La meilleure capacité de séparation indique un second métabolite glucuronide  à m/z = 548,125.

Les progrès technologiques permettent souvent de découvrir plus de détails, comme le montre la capacité de pics accrue de l’UPLC par rapport à la séparation traditionnelle en mode HPLC de ce que l’on pensait être un seul glucuronide.

Consultez les guides techniques consacrés à l’HPLC et l’UPLC dans notre bibliothèque de ressources sur www.waters.com.


Consultez également :

  • C.R. Mallet, Z. Lu et J.R. Mazzeo, A study of ion suppression effects in electrospray ionization from mobile phase additives and solid-phase extracts, Rapid Commun. Mass Spectrom. Vol 18, 1, 49–58 2004.
    • Intérêt de cette ressource : travaux souvent cités comparant des méthodes SPE.
  • L.L. Jessome, D. A. Volmer, Ion Suppression: A Major Concern in Mass Spectrometry, LCGC, Vol 24, 5 mai 2006
    • Intérêt de cette ressource : fournit une description détaillée de l’un des principaux obstacles rencontrés en ESI, à savoir les variations d’affinité protonique en phase gazeuse affectant la quantification.
  • Toyo’oka, Toshimasa, Determination Methods for Biologically Active Compounds by Ultra-Performance Liquid Chromatography Coupled with Mass Spectrometry: Application to the Analyses of Pharmaceuticals, Foods, Plants, Environments, Metabonomics, and Metabolomics, Journal of Chromatographic Science, Vol 46, 3, mars 2008, pp. 233-247
    • Intérêt de cette ressource : fournit un aperçu complet des publications relatives à la pratique actuelle de la chromatographie.
  • U. Neue, Theory of peak capacity in gradient elution, J Chromatogr A. 24 juin 2005 ;1079 (1-2):153-61.
    • Intérêt de cette ressource : discussion contemporaine sur la pratique actuelle de la chromatographie.
  • J. H. Knox and M. Saleem, Kinetic Conditions for Optimum Speed and Resolution in Column Chromatography, J. Chromatogr. Sci., 7 (1969) 614-622
    • Intérêt de cette ressource : un des papiers fondamentaux prédisant la pratique actuelle de la chromatographie.

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